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Ô cameroun !
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3 février 2015

Ama Tutu Muna : « Au Cameroun, on fondait déjà le fer avant même l’Europe »

Ama Tutu Muna, la ministre des Arts et de la Culture, présente les atouts du Musée national. Important lieu pour les étrangers, les touristes et même les locaux de prendre contact avec la culture camerounaise. Le 17 janvier 2015, un gala culturel y a été organisé pour son ouverture officielle après sa fermeture au public en 2009.

Investir au Cameroun : Pourquoi avoir tenu les journées portes ouvertes du Musée national en novembre 2014 et le gala culturel de lancement officiel du musée en janvier 2015 ?

Ama Tutu Muna : Le Musée national a tenu ses journées portes ouvertes en novembre 2014. C’était une manière pour le public d’être en lien avec son musée et avec son chef de l’Etat qui a bien voulu offrir cela de cette manière à tous les Camerounais et à ceux qui s’intéressent à la culture. Le gala de lancement officiel qui a suivi en janvier est venu cibler un public défini pour le musée. Nous avons pensé qu’il fallait dissocier les deux événements, parce que lors de ce gala, nous avons passé d’autres messages. Il fallait créer un «Awareness» qu’on doit repenser notre manière d’être en relation avec la culture. Le mécénat, le sponsoring, la philanthropie, toutes les grandes œuvres dans la culture sont parrainées par des bénévoles.

 

IC  :  Ce qui n’est pas encore le cas  au Cameroun...

ATM  : Je ne sais pas, mais nous sommes encore en train de faire un certain nombre de choses. C’est aussi culturel. C’est une manière pour nous de commencer à faire appel au secteur privé. Le chef de l’Etat parle de ce partenariat depuis très longtemps. J’embraye ici pour dire que le ministère l’a organisé en partenariat avec la Heritage Heart Foundation. Le ministère a cherché comment avoir une passerelle. Comment faire pour gérer et faciliter les rapports entre les institutions et le monde des affaires, le monde privé. Et vous savez que sous d’autres cieux, ce sont les fondations qui traitent avec les fondations pour pouvoir apporter de l’aide à la culture. Appuyés par le chef de l’Etat, nous avons pu créer cette passerelle depuis 2009 avec la Heritage Heart Foundation. Cela a facilité la mise en place de ce que nous sommes en train de voir. Aussi, ce musée crée la plateforme. Nous sommes en train de penser comment promouvoir le cinéma, la musique, etc. à travers ce genre d’événements. Tout ce que nous faisons pour la culture, le patrimoine, notre héritage, nous avons voulu placer cela dans cet espace qui est plein de symboles et qui a plein d’avenir. C’est grosso modo pourquoi nous l’avons fait en deux temps.

IC : C’est l’un de vos principaux défis. En dehors de ce gala culturel, comment envisagez-vous l’attrait des investisseurs privés pour financer la culture et les activités culturelles ?

ATM : Avant d’organiser ce gala culturel, nous avons rencontré le Gicam (Groupement inter patronal du Cameroun). Nous leur avons parlé de nos projets. Nous avons rencontré les acteurs du monde des affaires au Cameroun et ailleurs. Nous avons fait ce que l’on appelle en anglais l’« Advocacy». C’est-à-dire rencontrer beaucoup de personnes et leur dire ce que nous sommes en train de faire et de vouloir faire. Ainsi que les objectifs à atteindre. Le musée est une ins titution qui va au-delà de nos vies, parce que lorsqu’on regarde le bâtiment, il a été la résidence du gouverneur, avant d’être la Présidence de la république et le Musée national comme l’a décidé le chef de l’Etat. On a pensé au musée parce qu’il ne se construit pas seulement dans le temps, mais pour l’éternité. Qui ne souhaiterait pas être dans un projet qui va au-delà d’une vie humaine et au-delà des générations, car l’on parle d’héritage et de patrimoine? Voilà le symbole fort à travers lequel nous voulons rattacher les hommes d’affaires, parce que lorsque vous parlez d’affaires, les gens veulent de l’assurance.

 

IC : Pourquoi avoir pensé au thème « Renaissance culturelle » pour cette ouverture officielle du musée?

 

ATM : C’est en même temps une régénération. Le bâtiment a été réhabilité. Nous voulons que le monde entier connaisse le Cameroun et notre image du Cameroun. En plus, le président de la République venait de signer la charte de la Renaissance culturelle.

 

IC : De combien d’ œuvres d’art dispose actuellement le Musée national ?

 

ATM : Je parlerais d’expositions. Le Musée compte actuellement 21 expositions parmi lesquelles les archives photos qui racontent notre histoire, les instruments de musique, les architectures traditionnelles, les poteries, les vêtements, les symboles forts de l’Etat, etc. Le choix de ces instruments permet que nous nous rencontrions nous-même avec les instruments de la culture. En passant, j’ai omis les artéfacts. Combien de Camerounais savent que le Cameroun est une civilisation qui date de plus de 50 000 ans avant J-C ?

 

IC : Une communication a-t-elle été faite sur cet atout ?

 ATM : C’est à travers ce musée que les gens pourraient le savoir. Et même si la communication est faite, il y a des gens qui ne le sauront pas. La fierté, c’est de savoir que nous avons une civilisation ancienne. Au Cameroun, on fondait déjà le fer avant même l’Europe. Ce sont des choses que beaucoup de Camerounais ne savent pas. A travers ce musée, nous avons voulu dire ceci : voilà ce que nous savons de chez nous, voilà ce que les Camerounais peuvent venir découvrir sur eux-mêmes, et ensuite les autres humblement que nous n’avons pas eu tous les moyens qu’il fallait. Mais c’est déjà important d’avoir ce que nous avons sur la plateforme. Au fur et à mesure, au fil du temps, je pense que ce qu’on a commencé sera encore amélioré.

 

IC : Dans un récent entretien à la presse, vous avez parlé d’environ 3 à 4  milliards FCFA dépensés pour ce musée depuis 2009. Quel montant faudrait-il avoir pour le Musée national?

 

AT M : Oui, environ entre 3 et 4 milliards FCFA dépensés depuis 2009. Nous avions la période de  réhabilitation, puisque le musée était fermé. Il fallait refaire l’électricité, les plafonds, les lumières, tous les jardins du musée, on parle de 5000 m², les jets d’eau, etc. Nous n’avons même pas encore terminé. Mais, le gros du travail a déjà été réalisé. Il faut maintenant une gestion. Les décrets sur l’organisation sont sortis l’année dernière. Il faut à présent faire vivre ce musée et actionner les partenariats que nous avons essayé d’avoir à travers la Heritage Heart Foundation, et consolider cet acquis, former des spécialistes, etc.

Donc, il y a encore beaucoup à faire. Mais les moyens modestes que nous avons ne devraient pas nous décourager. L’ambition de la soirée de gala était également d’avoir des amis du musée, parce qu’il faut énormément de volontariat. Il y a beaucoup de scientifiques, d’anthropologues qui aimeraient bien, de manière bénévole, venir nous aider à former des gens.

 

IC : Combien faudrait-il pour que le musée soit au top   ?

 

AT M : Un musée n’est jamais complet. Il grandit et évolue selon un certain nombre d’expositions et de critères que l’on s’est fixés. Nous avons élaboré au Ministère des arts de la culture une politique pour quinze ans environ. Mais elle peut être changée par quelqu’un d’autre avec une autre vision. Toutefois il y a des expositions qui vont rester de manière définitive. Mais toujours avec une légère modification. On peut également nouer des partenariats avec d’autres musées qui pourront venir faire des expositions. Certains espaces pourront changer. Comme cette fresque quiest la donation de la petite-fille de Savorgnan de Brazza. Elle a commandé cette fresque qu’elle a gracieusement offerte au musée lors d’un dîner que nous avons organisé à l'étranger. Chaque fois que nous allons louer ce tableau qui est l’un des plus longs du monde, le musée aura de l’argent. Nous voulons multiplier ce type de formules. Nous avons également d’autres formules. Quelqu’un peut décider de donner 50 millions FCFA. Il y a des plaques platinum, or, etc. Nous avons même la possibilité de donner un nom à un espace. Tout cela en échanged’un certain nombre de ressources. On ira même plus loin avec des «fundraising », etc.

 

IC :Toutes les cultures du Cameroun sont-elles représentées au Musée national en ce moment?

 

AT M : Oui, nous y retrouvons la plupart des cultures. Nous y retrouvons ce qu’il y a dans les dix régions. Et toutes les aires culturelles sont représentées.

 

IC : Certains Camerounais et particuliers disposent de documents et d’archives importants sur le pays, de même que des œuvres particulières. Quelle politique le Ministère de la culture a-t-il mis sur pied pour que ces œuvres puissent être exposées au Musée national ou sauvegardées aux archives nationales ?

 

AT M : Je le dis vraiment avec beaucoup de respect. Nous n’avons pasencore assez la culture du don pour le service public. Demandez-vous pourquoi des Américains viennent au Cameroun ? Ils viennent ici parce qu’ils ont cette culture de faire des dons, etc. Je pense que des Camerounais peuvent le faire. J’ai eu des dons. Des chefs traditionnels parexemple ont offert gratuitement un certain nombre de pièces. Ils auront l’avantage que l’on marquera une petite histoire de leur chefferie, etc.Cela permet aux plus curieux d’aller vers cette chefferie. Nous avons d’ailleurs signé une convention avec les chefs traditionnels dans ce sens. Ces chefs sont aussi des garants de notre patrimoine et de notre héritage. Nous sommes donc très ou verts. Quelles sont les conditions? Pour les archives, par exemple, nous avons des défis en ce moment. Nous avons la liste de toutes nos archives qui sont à l’extérieur. Mais nous ne pouvons pas les ramener parce que nous n’avons pas l’espace adéquat.

 

IC : Ah bon ?

 

ATM : Oui, il faut un espace bien déterminé. Nous n’avons pas 8000 mètres linéaires, qui sont au jourd’hui le minimum pour cela. Pour nos archives nationales, nous n’avons pas encore les 800 employés qu’il faut. Nous avons donc commencé à dématérialiser progressivement. C’est l’occasion pour moi de féliciter le staff qui fournit ce travail, parce que c’est un travail de fourmis. Beaucoup de particuliers viennent nous donner des documents afin que nous puissions les enregistrer. Dans un proche avenir, nous allons mettre en place un site Internet où il sera plus facile que les populations échangent avec le staff du Musée national. Mais c’est progressif. Nous allons aller pas à pas.

 

IC : Pour les étrangers, quelle est la politique mise sur pied pour les attirer vers le Musée national ?

 

ATM : Après la soirée de gala de janvier, nous avons le projet de Bimbia, qui est le site des esclaves, et

chaque fois que je voyage, je me fais l’ambassadeur de notre culture. Il y a toujours quelque chose à montrer

sur notre culture et sur ce que l’on peut découvrir. Et le Ministère du tourisme fait également un travail

dans ce sens.

 

IC : C’est un lieu historique, le Musée national...

 

ATM : Tout à fait.

 

IC : Le premier président de la République du Cameroun, Ahmadou Ahidjo, avait ses bureaux dans cet édifice. Quel est l’espace consacré au premier président camerounais dans ce musée ?

 

ATM : Il y aura un espace disponible. Pour le moment, je ne souhaite pas en parler. L’espace est déjà alloué. Mais il y a quelques travaux que l’on devra encore faire.

 

IC : Travaux à faire dans son bureau par exemple ?

 

ATM : Oui, tout à fait.

 

Propos recueillis par Beaugas-Orain Djoyum

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