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Ô cameroun !
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16 mars 2015

Pierre de Gaétan Njikam Mouliom : « Tout peut vous réussir quand on a confiance en soi »

Pierre de Gaétan Njikam Mouliom, Camerounais d’origine, adjoint au maire de Bordeaux chargé de la coopération et du développement avec l’Afrique.

Pierre-de-Gaetan

Qu’est-ce qui fait courir Pierre de Gaétan Njikam Mouliom, qui s’illustre par l’hyperactivité multiforme, en particulier dans le domaine des relations entre Bordeaux, l’Afrique et le Cameroun en particulier ?

Je dois dire que c’est d’abord une conscience aiguë du destin de l’Afrique, qui a été alimentée par ma formation et mon engagement au Cameroun. Cette conscience aiguë du destin de l’Afrique, je la dois à mon pays qui a la chance de disposer de talents, d’intellectuels de renom, qui ont contribué à ma formation ; à une université camerounaise qui m’a formé. Je suis assez redevable à ce pays, le Cameroun, et à ce continent. C’est donc une nécessité, pour l’acteur bordelais que je suis, de contribuer à redonner à l’Afrique, et au Cameroun en particulier, ce qu’ils m’ont apporté. En même temps, il s’agit d’apporter une plus-value à cette ville qui m’a accueilli et pour la politique française au sein de laquelle j’évolue. C’est ce qui explique un peu cet engagement multiforme ¬– cet activisme comme diraient certains – à essayer de contribuer à ma manière, en tant qu’élément de la diaspora camerounaise et africaine, à l’évolution des relations entre la France et l’Afrique, et notamment le développement du continent africain.

Comment un jeune Camerounais d’origine devient-il adjoint au maire de l’importante métropole régionale qu’est Bordeaux ?

Ce qui est important à mon avis, c’est cette idée de confiance à laquelle je crois beaucoup. Il doit y avoir chez les jeunes Africains, formés en Afrique, formés au Cameroun, de la confiance. Pour ma part, j’ai eu vraiment de la chance d’être le produit de l’université camerounaise. Je me plais à rappeler à chaque occasion que le Cameroun est un grand pays. Parce que c’est armé de confiance que je suis arrivé à Bordeaux pour faire mon DEA. Cette confiance-là, il faut l’avoir ; parce qu’on est bien formé ; parce qu’on a la chance d’avoir bénéficié d’un écosystème intellectuel extraordinaire. Une fois qu’on est armé de cette confiance, il faut être décomplexé. Cela a beaucoup joué dans mon parcours. Je ne me suis pas posé la question de savoir si j’étais Africain, étranger, etc. Avant d’obtenir la nationalité française en 2007, j’ai eu à travailler avec Alain Juppé à partir de 2008, tout en étant étranger donc. Mon implication ici s’est traduite par le fait que je me suis dit : je suis capable de faire ceci ou cela ; quel que soit l’environnement, je donne à voir ce que je suis capable de faire. Cela ne veut pas du tout dire qu’on est reçu par l’environnement de manière enthousiaste ou simple. Mais, je me suis toujours posé la question de ma compétence, de mon utilité au sein d’un environnement. En somme, tout peut vous réussir à partir du moment où on a confiance en soi, qu’on est décomplexé, qu’on a une certaine idée de son utilité sociale.

Avez-vous le sentiment, s’agissant de la diaspora originaire du Cameroun, de l’Afrique centrale, qu’elle soit en mesure d’apporter un concours utile à tous ces projets visant à terme l’émergence du Cameroun et des autres pays de la sous-région ?

Je suis convaincu qu’il y a une opportunité, qui tient à plusieurs facteurs. D’abord un contexte qui est la réalité professionnelle, experte, de cette diaspora camerounaise qui existe. C’est un fait historique que la diaspora camerounaise aujourd’hui, dans son expertise, ses talents, son professionnalisme, existe. C’est aussi un fait qu’il y a une volonté, peut-être assez timide, des pouvoirs politiques camerounais, de mobiliser cette diaspora. Il y a une opportunité, une disposition et une disponibilité de ces acteurs professionnels, d’apporter leur contribution aux projets de développement du Cameroun. Encore faudrait-il que cette diaspora soit suffisamment informée et sensibilisée ; que la place et le rôle de la diaspora, phénomène nouveau dans l’histoire de nos jeunes pays, soient pris en considération dans les débats de société. Encore faudrait-il que la société, dans ses corps intermédiaires – le patronat, les entreprises, les associations, les communautés de développement dans les villages, villes et municipalités – s’intéressent à ces questions-là. Parce qu’il ne s’agit pas seulement de questions relevant de la politique nationale. Ce sont des questions de développement de la société et du quotidien des populations.

Vu de votre position, qu’est-ce qui explique qu’il y ait une sorte de double vitesse entre les diasporas d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique centrale.

Il y a des éléments d’ordre objectif et des éléments d’ordre subjectif. Objectivement, il s’agit d’Etats qui n’étaient pas au même niveau de développement. Le Mali, le Sénégal, le Burkina, etc. n’avaient pas la même densité professionnelle, le même capital humain. On a des Etats qui très vite ont été confrontés positivement à l’implication de leurs diasporas, surtout dans les projets de solidarité internationale. Il n’est sans doute pas tard de s’engager sur une approche structurante de cette question de l’implication de la diaspora. A condition que cette diaspora s’assume comme telle, que là où elle est, qu’elle essaye de se renforcer, d’avoir suffisamment de leviers pour être utile au pays d’origine ou aux ressortissants du continent africain. Il ne s’agit pas d’une diaspora ayant une vocation messianique. Elle doit éviter le double piège du réflexe nostalgique et du credo messianique. Très concrètement, il s’agit que là où l’on est, on voie en quoi on peut être utile à l’avenir du continent africain.

A propos de ce qui apparaît comme votre nouveau cheval de bataille, la promotion des jeunes entrepreneurs camerounais, l’expérience est-elle prometteuse ?

Cette démarche visant à accompagner de jeunes entrepreneurs camerounais et africains est née de la conviction que je partage avec beaucoup d’acteurs, à savoir que le développement de notre pays passera par une épaisseur du secteur privé, mais un secteur privé articulé aux enjeux de la pauvreté, de croissance inclusive. C’est la raison pour laquelle je me suis très vite intéressé à la situation des jeunes entrepreneurs camerounais. J’avais pu constater qu’ils avaient trois types de besoins. D’abord un besoin de qualification managériale, la question étant ici de savoir comment faire pour renforcer leurs capacités managériales ; ensuite comment faire pour les aider à accéder aux financements, sachant à quel point les PMI/PME, TPI/TPE ont du mal à disposer d’un minimum de capital pour passer le cap au-dessus ; et enfin l’articulation à un certain nombre de réseaux, de partenaires, de contacts qui leur permettraient non seulement de se désenclaver en tant qu’entrepreneurs du 21ème siècle, donc qui ne sont plus repliés sur leur quotidien, mais qui peuvent, par le fait d’être connectés aux jeunes comme eux d’autres continents, améliorer leur business. C’est dans cet esprit que nous avons lancé l’initiative de faire venir à Bordeaux tous les ans deux lauréats. Notre objectif est d’aller plus loin dans cette expérience pour laquelle nous en sommes à la troisième édition. A l’occasion de la 3e journée nationale des diasporas africaines le 24 avril prochain, nous allons lancer le nouveau format consistant non seulement à augmenter le nombre de lauréats de deux à cinq, mais surtout à mettre en œuvre le volet supplémentaire qu’est l’accompagnement sur place des jeunes entrepreneurs.

En tant que cheville ouvrière de la rencontre organisée ici à Bordeaux et qui, en marge de la conférence-dédicace du Pr. Tabi Manga, a donné l’occasion à la SOPECAM de donner à voir son know how en matière d’édition, qu’est-ce qui vous a motivé ? Quelle valeur ajoutée voyez-vous dans cette opération ?

D’abord le souvenir d’une rencontre. Nous avons eu le privilège d’être accueilli doublement à Yaoundé : d’abord par le groupe des anciens de Bordeaux rassemblés par le Pr. Jean Tabi Manga lors de la visite de M. Alain Juppé à l’occasion de la conférence Africa 21 à Yaoundé ; ensuite par Mme Marie Claire Nnana, en sa double qualité de DG de la SOPECAM et directeur de publication de Cameroon Tribune à son bureau avec la délégation du club Bordeaux-Cameroun-France. La deuxième chose, c’est ma préoccupation en tant qu’élu bordelais en charge des relations avec l’Afrique, celle d’amener le public bordelais et français en général à connaître les réalités africaines telles qu’elles sont écrites à partir de l’Afrique. Pour nous acteur de la relation Bordeaux-Afrique, il est important que le grand public ait une idée beaucoup plus précise de la situation du continent africain à partir de leur vécu de la quotidienneté africaine. C’est la raison pour laquelle lorsque l’idée de cette conférence nous a été proposée par le Pr. Tabi Manga avec la participation des Editions SOPECAM, nous nous retrouvions effectivement dans la préoccupation et l’objectif de la ville de Bordeaux de favoriser une meilleure connaissance des réalités camerounaises et africaines. Troisième et dernier élément, c’est aussi de profiter de cette rencontre pour échanger avec les acteurs bordelais sur les possibilités de travail en commun, de partenariat à la fois professionnel et universitaire avec les acteurs universitaires et journalistiques de Bordeaux.

 

Source : Cameroon Tribune

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