Le ''Kilichi'', un délice à exporter
Améliorer la qualité du «Kilichi» offre des opportunités d’exportations à l’étranger.
Le «Kilichi», aliment fait exclusivement à base de gigot de bœuf est un véritable régal pour les populations camerounaises.
Produit en abondance au Nord du pays, il est parfois présenté comme le cadeau idéal à rapporter lorsqu’on part de cette région pour le Grand Sud. Il s’obtient en découpant la viande en fines lamelles que l’on sèche et grille. C’est un produit qui peut être conservé pendant plus de six mois, mais à condition qu’il soit bien séché.
Historique
A l’origine, le «kilichi» était fabriqué pour pallier au problème de conservation des invendues des bouchers Nigériens. Le temps évoluant, ceux-ci ont pris conscience de sa valeur marchande et ont décidé de le produire à grande échelle, tout en ajoutant à l’assaisonnement des épices et de la pâte d’arachide, afin de le rendre facilement comestible .
Cette initiative a fait son chemin et a fini par conquérir les pays étrangers tels que le Nigeria, le Soudan et le Cameroun. Désormais, le «Kilichi» est commercialisé sous sa forme pimenté et non pimenté.
Cependant, la forme pimenté se vend davantage, certainement grâce à son goût salé et piquant, confie Ismaël, fabricant et vendeur de «Kilichi» à Ngaoundéré.
Selon leur longueur, les prix des tranches varient entre 500 et 2 000 Fcfa. Le «Kilichi» est vendu soit dans son lieu de fabrication où il est exposé dans des sortes de placards vitrés, soit à la criée dans les points chauds des villes tels que les marchés, les agences de voyage et les gares où il est proposé dans de grands vases recouvert de film plastique censé le protéger de la poussière et des intempéries.
Améliorer la qualité
Pour attirer la clientèle, les fabricants badigeonnent leur marchandise d’huile ayant préalablement servi à frire de l’oignon, ce qui lui donne une bonne odeur et une couleur vive.
Même si deux types de «Kilichi» sont mis sur le marché, les marges bénéficiaires que génèrent les ventes de chacun d’eux sont d’une différence peu significative. En effet, seul le piment constitue la distinction entre les deux produits.
Bien qu’il soit possible de fabriquer du «Kilichi» à base de viande de mouton ou de chèvre, la viande de bœuf est la préferée pour la production à titre commercial parce que moins graisseuse et moins coûteuse que les autres.
Quoi que les intervenants de la filière s’accordent à reconnaitre au «Kilichi» de bonnes opportunités d’exportation vers des pays de l’Afrique de l’ouest, de l’Europe et même de l’Asie, ils pensent que le secteur ne pourra pas prospérer au niveau international si deux problèmes majeurs ne sont pas résolus. D’abord, la hausse du prix des matières premières notamment celui de la viande. Enfin, l’absence quasi totale d’une règlementation définissant la qualité du produit.
A ce titre, des contrôles qualité devraient être régulièrement initiées afin que soit observé le nettoyage systématique des mains et des matériels, que l’enrobage soit par exemple pasteurisé et que le séchage se fasse dans le respect des normes d’hygiène.
Abbo Mohamadou
« Certains clients revendent mon «Kilichi» en Arabie Saoudite »
Aboubakar Tanko, fabricant de Kilichi à N’Garoundéré, région de l’Adamaoua
« Je suis d’origine Nigérienne et installé au Cameroun depuis plus de 20 ans. J’ai d’abord exercé comme cireur, ensuite vendeur d’eau, puis restaurateur, avant de me lancer dans la production du «Kilichi».
Au début, je ne disposais ni de fonds propre, ni de lieu de fabrication. Mais comme j’avais des amis bouchers, j’ai conclu un contrat avec l’un d’eux. Il me livrait la viande à crédit. Et pour le lieu de fabrication, j’ai du m’installer aux côtés d’un grand frère et on se partageait les frais de location.
J’ai évolué et aujourd’hui je dispose d’un capital propre et j’ai un employé. Je transforme vingt kilogrammes de viande par jour.
Je suis assez épanoui dans cette activité parce qu’elle me permet de subvenir aux besoins de ma petite famille et de mes parents restés au Niger. J’envisage me construire une maison.
Mon rêve le plus cher, c’est de pouvoir exporter mon «Kilichi» puisque j’ai récemment découvert les opportunités que pourrait offrir le marché extérieur. Certains de mes clients revendent mon «Kilichi» en Arabie Saoudite pendant la période de pélerinage. Ils disent réaliser de gros bénéfices. Ils m’ont toujours encouragé à nouer des contacts avec des saoudiens. J’aimerais bien le faire, mais je ne connais personne en Arabie Saoudite et cela demande davantage de moyens.
Ces goulots d’étranglement ne me découragent pas. Je cherche un appui financier d’une banque ou d’un frère. Jusqu’ici, je n’en ai pas trouvé mais je reste persuadé que le soutien finira par arriver».
Propos recueillis par Abbo Mohamadou La Voix du Paysan