Le casse-tête des indemnisations sur les projets d'intérêt public
En vue d’imprimer une nouvelle dynamique à l’économie nationale et, ce faisant, mettre le Cameroun sur les rails de l’émergence, les autorités publiques, au premier rang desquelles le président de la République, Paul Biya, ont depuis quelque temps transformé le pays en un vaste chantier. C’est ainsi que fleurissent ici et là des projets de construction ou d’aménagement de routes, ports, aéroports, voies ferrées, pour favoriser la circulation des personnes et des biens ; des barrages hydroélectriques en vue de résorber le déficit de l’offre en énergie électrique ; des adductions d’eau potable, des logements sociaux, des formations sanitaires pour accroître l’offre dans chacun des secteurs concernés.
Il se trouve malheureusement que de nombreux projets de développement connaissent ces derniers temps un ralentissement préjudiciable, du fait des problèmes relatifs à l’indemnisation des populations dont les propriétés ou biens sont affectés par l’emprise desdits projets. Il suffit d’évoquer le cas des autoroutes Yaoundé-Douala et Yaoundé-Nsimalen, du stade d’Olembé, de la route Sangmélima-Djoum-Ouesso ou du port en eau profonde de Kribi pour s’en convaincre. De fait, l’indemnisation qui devrait précéder la réalisation des projets attire beaucoup de monde. Avec toutes sortes de dérives, généralement dans l’intérêt des individus, au détriment de l’intérêt général.
Pourtant lorsque le gouvernement décide de réaliser un projet et que les travaux envisagés sont déclarés d’utilité publique, le cheminement à suivre pour parvenir à l’indemnisation est clair. Il faut d’une part mener des enquêtes permettant de choisir le site du projet, identifier les personnes ou communautés affectées et expertiser les biens mis en cause en présence de toutes les parties prenantes. D’autre part, il faut mobiliser tous les financements nécessaires à l’indemnisation des victimes et leur relocalisation.
S’agissant du montant du préjudice subi, il est fixé par la commission chargée des enquêtes préalables à l’expropriation ainsi que l’a relevé le ministre des Domaines, du Cadastre et des Affaires foncières, Jacqueline Koung à Bessiké dans un entretien publié dans nos colonnes le 30 août 2012 .
- Pour les terrains nus résultant d’une détention coutumière ayant donné lieu à l’obtention d’un titre foncier ou dont la demande d’immatriculation directe a reçu l’avis favorable de la commission consultative compétente à la date de publication de l’arrêté déclarant d’utilité publique les travaux en cause, l’indemnité est calculée au taux minimum officiel des terrains domaniaux non viabilisés du lieu de situation de l’immeuble, tel que fixé par la circulaire du 22 mars 1994 ;
- Pour les terrains résultant d’une transaction normale de droit commun ou d’une acquisition des terrains domaniaux, l’indemnisation est égale au prix d’achat, majoré des frais divers d’acquisition ;
- Pour les cultures, l’indemnisation est calculée sur le taux de pieds, de l’âge, et du prix urbain des différentes spéculations tel que prescrit par le décret n°2003/418/PM du 25 février 2003.
- Pour les constructions et les autres mises en valeur, l’indemnisation est estimée par la commission de constat et d’évaluation, suivant les critères définis par l’arrêté n°0832/Y.15.1/ du 20 novembre 1987.
Malgré les dispositions législatives et réglementaires ainsi prises pour que les opérations d’indemnisation des personnes affectées par des projets d’intérêt public se déroulent dans la transparence et que les fonds prévus à cet effet n’aillent pas au-delà des prévisions, on assiste régulièrement à des dérives graves. Aussi bien lors de la conduite des enquêtes préalables à l’expropriation, que lors du paiement effectif des indemnités conséquentes. Au mépris de l’éthique et de l’orthodoxie en matière de gestion des deniers publics consacrés au paiement de la créance indemnitaire. Pour tenter de comprendre pourquoi les indemnisations demeurent un casse-tête dans la réalisation des projets d’intérêt public, CT Analyses revisite quelques cas litigieux, présente les récriminations des populations, les mauvaises pratiques qui font gonfler les enveloppes des projets, donne la parole aux acteurs de terrain et rappelle ce que dit la loi en la matière. Puis, à travers des analyses de la Rédaction, propose des pistes pour inverser la tendance actuelle qui représente sans conteste une entrave de taille au développement du pays.
Source : Cameroon Tribune