Cameroun : Santé pour tous, affaire de tous vers un meilleur
Comme c'est souvent le cas au Cameroun, et encore plus depuis la popularisation des réseaux sociaux et des médias Internet, toutes les occasions sont bonnes pour que les camerounais, exposent, humains qu'ils sont, leurs émotions positives ou négatives en mondovision.
C'est souvent le cas lorsque les Lions Indomptables remportent (remportaient) ou perdent un match important, à chaque attentat ou victoire des notre armée ou encore récemment dans une affaire privée puis publique opposant une immense star de football et une grande et forte jeune camerounaise entre autres. Et deux événements particuliers qui se sont produits dans des hôpitaux ont pris des ampleurs émotives tempérées ou exagérées, mais toutes compréhensives sur les réseaux sociaux et partout au Cameroun. Toutes compréhensives sans exceptions, ces réactions ne font que nous réjouir en démontrant que tous les camerounais ont du cœur.
Le décès de deux de nos mères et sœurs camerounaises, dont la dernière avec ses deux jumeaux, ont encore poussé les camerounais et camerounaises de manière légitime pour les uns à des concours du plus effarouché et pour les autres à des émotions davantage rationalisées.
Entre les tenants, du changement de régime politique que l'on peut soupçonner non incidemment d'opportunime, et ceux qui soutiennent plutôt la continuité de celui-ci, les deux on ne peut plus légitimes, il y a les camerounais, l'ensemble des camerounais, des deux bords et ceux sans bord établi, qui aspirent au changement profond des mentalités et des pratiques dans un pays à l'esprit renouvelé de fond en comble et dans tous les domaines.
Pour ce qui est du domaine de la santé, quelque soit ce qui s'est réellement passé ce samedi 12 mars à l'hôpital Laquintinie, je tiens personnellement, à remercier l'ensemble du corps médical de mon pays, à savoir des docteurs, infirmiers et membre du personnel des centres de santé et de tous les lieux, publics et privés, ruraux et urbains qui dans des conditions souvent très difficiles exercent leur métier. Vous sauvez chaque jour au Cameroun, personne ne peut le nier, des centaines de vie, et comme dans tous les pays, mais dans notre contexte, certains malades et accidentés échappent à votre volonté de soigner dans le respect de votre serment, pour ceux d'entre vous dans ce corps de métier de la santé, qui en ont.
Je tiens aussi à féliciter le gouvernement camerounais, l'État et tous les jeunes et moins jeunes qui l'accompagnent au Cameroun, et qui par des actions privées démontrent au quotidien, de manière citoyenne et engagée, que la santé, l'amélioration de son service et de son accès pour tous, leur tient profondément à cœur.
Mais bien évidemment, il n'existe aucun camerounais qui pourrait dire que nous avons réellement atteint le minimum nécessaire en ce qui concerne l'accès aux soins de santé de qualité dans notre pays. Et bien sûr, malgré les avancées sur lesquelles je reviendrai succinctement plus bas, le gouvernement camerounais, l'État, qui certes a des choix difficiles à faire comme il se doit quand on gère un pays avec des ressources limitées et qui ne se réduisent pas au domaine de la santé, a une très grande part de faillite au vu de la situation qui demeure généralement lamentable dans la plupart des établissements de soin de santé à travers le pays.
Un État, un gouvernement, limité dans ses moyens malgré les besoins, même au-delà de la santé, qui eux sont sans limite, ne peut certes tout faire, mais il a l'obligation permanente, perpétuelle, quotidienne, régulière, continuelle de mieux faire. La disette en moyens ne doit jamais justifier que l'État, le gouvernement, laisse même seulement l'impression d'une misère, celle-là imaginative, d'une limitation dans la volonté ferme d'aller toujours vers ce meilleur.
Et de manière là aussi générale, la faillite est aussi celle d'un bon nombre de membres du corps des métiers médicaux, qui en son sein, comme dans tous les domaines d'activités sans exception au Cameroun, ont un nombre de brebis galeuses. Ces derniers ressemblent bien plus à des jeunes adolescents qui ne deviendront jamais adultes, jamais responsables, même si le contexte général du pays, de nation en construction et qui se cherche, plus souvent que moins, les oblige dans une misère relative, à oublier les beaux principes.
Je reviens pour insister sur ces jeunes et leurs initiatives, qui nous donnent espoir en la nouvelle génération de camerounais, et pas seulement dans le domaine de la santé, que nous pouvons y croire à un meilleur. Pardonnez-moi de ne citer que quatre exemples que j'admire particulièrement : d'abord les jeunes Alain Nteff et le docteur Conrad Tankou et leur initiative Gifted Mom qui combat la mortalité des mères enceintes et de leurs nouveaux nés grâce aux technologies de l'information, avec un impact qui va grandissant en zones rurales principalement là oùles besoins sont criants.
En deuxième l'organisme associatif SOS Médecins Cameroun, encore une initiative de jeunes docteurs, menée par Dr Patrick Kuissu, qui entre autre fait partie des pionniers dans les soins préventifs et à domicile au Cameroun, et qui mène des activités médicales qui progressivement vont s'étendre à toutes les régions du Cameroun.
Il y a aussi le non moins jeune chirurgien camerounais, le Dr Georges Bwelle, président de l'association Ascovime, qui avec une équipe de bénévoles, achète des médicaments, des équipements médicaux et soigne et opère des camerounais partout dans le pays.
Enfin, il y a le Relais Enfants – Parents Cameroun (Repcam) de la jeune Claire Ndi Samba qui n'est pas directement lié aux services de santé, mais qui a un impact direct et indirect important sur celle-ci. Le Repcam prend souvent en charge, grâce aux dons, les soins de santé de certains mineurs dont les parents sont emprisonnés, en plus de tenter de leur offrir un semblant de vie normale, par des actions qui elles aussi influencent profondément leur état de santé mentale et physique.
En commun les quatre et des centaines d'autres, ont ce qui doit guider en premier chaque camerounais du corps médical dans le domaine de la santé, et l'ensemble des camerounais dans l'approche du service, à savoir le cœur à la main, qu'ils offrent aux patients ou à leur prochain au Cameroun.
Le Premier ministre camerounais, rappelait en juillet 2015, à l'occasion de l'inauguration de l'hôpital de référence de Sangmelima (d'une capacité d'accueil minimal de 115 lits, et de services de consultation externe, imagerie médicale, bloc opératoire, pharmacie, un bloc laboratoire, service des urgences, d'une morgue, d'un héliport, 17 logements d’astreinte, une cuisine et un scanner de dernière génération avec option cardio vasculaire) que la région du Sud comptait 39 formations sanitaires, publiques et privées dans les années 80 contre 315 en 2015. Progrès insuffisant peut-être, mais progrès quand même.
L'État camerounais a inauguré en 2015 à Yaoundé, un Centre des Urgences (un scanner de 16 barrettes avec option cardio-vasculaire )fruit de la coopération avec la Corée du Sud.
L'hôpital gynéco-obstétrique de Douala, construit avec le soutien de la Chine (ORL, l’ophtalmologie, 303 lits )a lancé ses activités le 26 août dernier pour sa part.
Le Centre hospitalier de recherche et d’application en chirurgie endoscopique et reproduction humaine de Yaoundé (service d’accouchement classique, de la néonatalogie, de la chirurgie gynécologique, prise en charge des couples infertiles, cures psychosomatiques ) est aussi opérationnel depuis 2013, et les patients jusqu'en Octobre 2014 bénéficiaient encore de soins gratuits en attendant le lancement officiel et la fixation des tarifs.
Le Maghrabi Ico Cameroun Eye Institute dans la petite localité d’Oback dans l’arrondissement d’Okola, département de la Lékié, un centre de référence en Afrique au sud du Sahara en matière d’ophtalmologie entrera bientôt en fonction.
Pour davantage rapprocher le service du patient, des services d'imagerie médicale ont récemment été mis en service dans des villes comme Garoua, (3000 examens effectués en 2015) dont les patients devaient auparavant se rendre à Yaoundé ou Douala.
Non loin de là Maroua qui dispose d'un Centre d'Hémodyalise depuis 2012, verra bientôt son hôpital régional doté d'un Centre d'Imagrerie Médicale (le scanner, de numérisation, un scanner, radiologie-os-poumons, échographie, mammographie, radio mobile et la paranomique dentaire ), dont le chantier pointait à 60 % de réalisation en juin 2015.
Depuis 2012, Bafoussam dispose également d'un Centre d'imagerie médicale (scanner, salle de radiologie des os et des poumons, un mammographe pour le diagnostic du cancer du sein, échographe, appareil de numérisation d’images, bureaux de médecins ) et depuis 2013, un Centre des Urgences (mini centrale à oxygène, salles de réveil, de consultation, de soins, de garde pour infirmiers; des salles d'hospitalisation pour enfants et adultes, bureaux et toilettes ) a été construit et mis en place dans son Hôpital régional.
Bertoua, Buéa et Bamenda ont elles aussi été dotées d'un centre régional d'imagerie médicale au cours des dernières années.
7 capitales de région ( sauf Maroua en finition, ngaoundéré et Bafoussam) du Cameroun disposent également depuis récemment de Centre d'hémodyalise, dont Bamenda et Garoua (2009), Buéa (2011- 8 générateurs d'analyse de 4008 MHz, des équipements d'hémodialyse, bureaux administratifs, salles de soins, des salles d'hospitalisation, 48 patients à 72 patients en temps de saturation), Bertoua (2012- cinq grands blocs avec bureaux, salles d’attente, de traitement, de générateur ), Depuis 2014 à Ebolowa, le centre (08 générateurs de dialyse, une salle de traitement d’eau, un groupe électrogène de 250 Kva, d’un onduleur de 120 Kva, des bureaux, des salles de traitements, de surveillance et de pose de cathéter ) a une capacité de 60 à 70 patients, dont la prise en charge est subventionnée à 95 % par l'état.
Précisément dans le domaine de la santé des mères enceintes, le Cameroun a mis en place depuis 2011, un système de chèque santé pour améliorer l'accessibilité financière aux services de santé maternelle et infantile, avec le soutien de la France. Selon les informations du projet Chèque Santé récemment lancé dans l'extrême nord du Cameroun , ''Acheté à 6000 Frs le chèque prend déjà en charge les 4 consultations prénatales , l'échographie , l'accouchement simple, l'accouchement compliquée, la césarienne le cas échéant , les consultations post natales de la maman et du bébé durant les 42 jours après l'accouchement''.
Des organisations associatives locales et de la diaspora camerounaise sont également dans l'action en faveur d'un meilleur accès aux services de la santé. Pardon encore de me limiter à l'exemple de la Fondation médicale Frantz Fanon du Pr Tetanye Ekoe et l’Association amicale et fraternelle EPEPA (solidarité) qui regroupe lesBakoko du Cameroun qui a en août dernier offert d lits médicalisés, un tensiomètre statique, une table d’accouchement moderne, un pèse-bébé électronique et une boite d’examen gynécologique au Centre de santé d'Elogbatindi.
En février 2016, on apprenait que la Plateforme des promoteurs des mutuelles de santé au Cameroun (Promuscam), par le biais de Initiative à résultats rapides (irr), a permis dans son application à révolutionner le service dans certains établissements dont le centre de santé intégré (Csi) de Bangoua, le centre médicalisé d’arrondissement (Cma) de Balessing, l’hôpital de district de Ntui et le Csi de Mindourou, avec l'implantation de mesures simples telles que l'aménagement des toilettes aménagées et propres, l'institution de journées de propreté, l'affichage tarifaires ou encore un système de jeton de passage, pour que lorsque c'est possible, les premiers arrivés soient servis en premier.
Dans le domaine de la formation, les 50 premiers chirurgiens formés au pays ont prêté serment en décembre dernier.
Pour moi, il y a de l'espoir, mais bien sûr, ce n'est pas ce dernier qui offre des soins de qualité aux patients. Et on attend impatiemment l'État et son Plan d'urgence qui devrait doter d'ici deux ans environ , chaque région d'un Hôpital de Référence moderne.
Les infrastructures restent donc déficitaires en nombre, en qualité et en répartition territoriale. Mais la vraie révolution en Afrique, au Cameroun en général, dans tous les domaines, sera la Révolution du service.
Il y a un urgent besoin d'uniformisation desdits services. Le Ministre de la santé a récemment signé une circulaire qui demande aux Directions des établissements de santé de prioriser en quelque sorte la prestation des soins de santé avant de demander la facture. C'est bien, mais bien trop peu, quand on sait que dans notre pays, est-ce-le sang ? Tant que règne l'impunité et l'irresponsabilitation donc, les décrets, arrêtés sont beau être signés, leur application se fait trop souvent à la tête du client et du prestataire de ce service.
Concrètement, si on peut saluer les projets pilotes, il est urgent que partout, soient appliqués les mêmes règles, offerts les mêmes services. Qu'à Buéa, Douala, Dibombari, Kousséri, Dimako, Kribi, Boumnyébel, Bandjoun, Tokombéré ou à Bakassi, le camerounais puisse s'attendre à recevoir exactement le même accueil, la même qualité de service, à percevoir le même dévouement du corps médical pour ce qui est du domaine de la santé.
Le gouvernement a son rôle à jouer, en améliorant les conditions de travail et en continuant de manière accélérée à fournir en infrastructures et équipements modernes les centres de soins de santé sur l'ensemble du territoire, dans les villes grandes, moyennes et petites et dans les villages.
Le gouvernement pourrait par exemple, s'il n'est pas capable d'utiliser à meilleur escient les cadres fonctionnaires et personnels, solliciter une expertise privée, associative, des ONG pour
1 – établir une charte des services de santé au Cameroun avec des critères de services minimums à offrir de manière obligatoire dans tous les services de santé au Cameroun, dont un tableau résumé devrait être affiché à la vue de tous dans chacun de ceux-ci sur tout le territoire
2- élaborer un calendrier de mise en place de ces critères dans un délai de six mois maximum,
3 – de constituer des équipes mobiles d'accompagnement mixtes formées des personnels du gouvernement et d'autres de la société civile spécialisés dans le domaine de la santé ou non, qui se déploieront, chacune dans une région, au même moment dans chaque centre de santé répertorié, grands ou petits, sur une période courte pour des formations à l'application sans délai des critères de services établis,
4- 'établissement de critères de notation et de vérification hebdomadaires des performances au regard des nouveaux critères, qui tiendront compte des avis des patients et visiteurs des centres de santé. Dans ce sens, on peut imaginer un site Internet sur lequel les patients pourront noter de 1 à 10 l'accueil, la qualité du service etc des centres de santé dans lesquels ils se sont rendus, avec la possibilité d'y inscrire à fois ce qui a été bien fait et ce qui a été mal fait selon eux. Il y aurait par contre une interdiction de mention de noms des personnes pour éviter une atteinte à réputation et les lynchages émotifs.
Le dernier point serait celui de la communication et de la diffusion de l'information. Les autorités en charge de la santé doivent être présents, informer le corps médical en temps et en heure en utilisant les nouvelles technologies, informer les patients et le public en général sur la qualité de service, le mode de prestation de ce service, sur leur disponibilité, leur tarification, les moyens de pouvoir se plaindre en cas de non respect de ceux-ci et de la qualité de service. Le gouvernement, le Ministère de la Santé, dans le cas se tire lui même dans les pieds, en e se servant pas des moyens de communication moderne, réseaux sociaux (pas de site facebook, pas de photos sur le site et d'actualités récentes) à portée de tous pour communiquer sur ses actions qui sont pourtant nombreuses, mais majoritairement inconnues de l'immense majorité des camerounais.
Bref, les visées politiques d’enracinement ou d'implantation sont là, légitimes. Avec le ministre actuel ou son éventuel remplaçant, sous le régime actuel ou le prochain, la santé au Cameroun, comme beaucoup de secteurs, a grand besoin de réformes .En premier, la réforme de tous les esprits, mais aussi des structures et des pratiques pour en arriver à cette révolution dans les services, de santé notamment.
Guy E Mbarga.